Le 5 mars 2022, à la lisière entre le région du Kantō et la région du Tōhoku, à Nasuno, la Sesshōseki s’est brisée. Apparemment, elle abritait un démon…
Les Japonais l’appelle Sesshōseki 殺生石, et les sinogrammes expliquent la traduction française drôle et curieuse que nous en avons fait. En effet, le premier 殺 signifier « tuer », le deuxième 生, parmi plusieurs significations liées à la sphère vitale, signifie « naître » ou « faire naître », mais également « produire, causer un événement » et, enfin, le dernier 石 signifie « pierre ».
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Mais pourquoi a-t-elle un nom si redoutable ? D’après la légende, elle abrite l’esprit de Tamamo-no-mae 玉藻の前 (« demoiselle Joyau-Lumineux »), qui apparut à la cour de l’Empereur retiré Toba, et qui grâce à son intelligence et sa beauté le conquit. Après avoir entretenu des relations intimes avec Tamamo-no-mae, l’empereur tombe malade, et l’expert divin de la Cour impériale, Abe no Yasunari fit des divinations pour comprendre la cause de ce mal. Il découvrit que la courtisane était en fait une incarnation du renard à neuf queues, qui habitait la lande de Nasuno. Démasquée, elle fut tuée, et son esprit se réfugia dans la célèbre pierre. On dit que cette pierre causerait la mort des personnes qui s’en approcheraient.
Ainsi, au levé du soleil et avec la rosée qui n’avait pas encore disparu, les villageois de Nasuno se sont réveillés il y a peu dans la frayeur. Que faire maintenant ? Laisser la pierre brisée ? La rattacher ? La communauté de la petite ville de Nasuno se questionne sur la manière d’agir, mais une chose est certaine : la nouvelle a traversé l’archipel entier et a dépassé les frontières pour se répandre dans le monde entier !
Bien que cette légende ne soit pas très connue à l’étranger, au Japon, plusieurs œuvres artistiques se sont inspirés de cet événement, comme au sein des otogi-zōshi 御伽草子, qui regroupent plus de 300 récits de l’époque Muromachi (1336-1573) du Japon, et même un yōkyoku 謡曲, l’une des chansons qui intégrait le théâtre nō.
Sources :
- IYANAGA Nobumi, « Tantrism and Reactionary Ideologies in Eastern Asia: Some Hypotheses and Questions », Cahiers d’Extrême-Asie, vol. 13, 2002. www.persee.fr/doc/asie_0766-1177_2002_num_13_1_1175, consulté le 30 Mars 2022.
- Tamamo-no-mae, URL : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tamamo-no-Mae, consulté le 30 Mars 2022
- Grande dictionnaire de la langue japonaise 日本国語大辞典, « Tamamo-no-mae 玉藻前 », JapanKnowledge, [En ligne], consulté le 30 Mars 2022.
- 割れた殺生石どうする そのままか復元か…「これはこれで」観光客には人気 [Que faire de la pierre tueuse cassée : la laisser telle quelle ou la restaurer… « C’est ainsi », populaires auprès des touristes.], URL : https://www.shimotsuke.co.jp/articles/-/562613, Shimotsuke shinbun, consulté le 03 avril 2022.
- McCURRY Justin, « Japan’s « killing stong » splits in two releasing superstitions amid the sulphur springs », The Guardian, URL : https://www.theguardian.com/world/2022/mar/07/japans-killing-stone-splits-in-two-releasing-superstitions-and-toxic-gases, consulté le 30 mars 2022.
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Par Paolo Falcone