Blitz est un manga consacré à l’univers des échecs. Le 6e tome est paru le 25 février 2022. À cette occasion, nous avons eu le privilège d’interviewer Cédric Biscay lors de son passage à Paris.
Trailer du tome 6 (qui sort le 25 février)
Japan Magazine : Avant d’être l’auteur du manga Blitz, pouvez-vous nous présenter votre parcours ?
Cédric Biscay : Je suis le président d’une entreprise qui s’appelle Shibuya Productions qui développe et produit des jeux vidéo, des dessins animés, des mangas et des documentaires. J’organise aussi le festival MAGIC à Monaco et à Kyoto. Je suis également l’auteur et le coscénariste du manga Blitz.
JM : Pouvez-vous nous dire en quelques mots l’histoire de ce manga et que va-t-il se passer dans le 6e tome ?
CB : C’est l’histoire d’un jeune garçon qui s’appelle Tom qui est amoureux d’une fille qui s’appelle Harmony. Malheureusement, elle ne s’en rend pas compte, parce qu’elle ne s’intéresse qu’à une seule chose dans sa vie : les échecs. Tom ne comprend rien aux échecs, mais il se dit que de toute façon pour arriver à approcher cette fille, il va être bien obligé de s’y mettre. Il va falloir qu’il apprenne tout depuis le début. On a mis des petits éléments un peu fantastiques dans le tome 1, qui font qu’il va apprendre un petit peu plus rapidement que les autres. L’aventure se poursuit avec des tournois. Je ne vais pas vous révéler ce qui va se passer au tome 6, mais dans le tome 5, nos héros sont en plein cœur du tournoi de repêchage des qualifications au tournoi national. Leur ambition est d’aller le plus loin possible, parce qu’ils ont en ligne de mire la participation au grand tournoi d’échecs qui va être organisé par Garry Kasparov dans l’enceinte du casino de Monte-Carlo.
JM : D’où est venu ce projet ? Est-ce que vous êtes un passionné d’échecs ?
CB : Passionné d’échecs, c’est un bien grand mot. J’ai appris à jouer aux échecs à l’école primaire, parce qu’il y avait un professeur qui m’avait enseigné. Je connais les bases. C’est juste un rêve pour moi de faire des mangas, mais je ne suis à la base ni auteur ni scénariste et je ne suis pas bon en dessin. C’était donc plutôt compliqué de m’imaginer faire un manga. Mais au fur et à mesure des années, je me sentais capable de créer l’histoire d’un manga. J’ai décidé d’en faire une sur les échecs, parce que cet univers était peu exploité. J’ai tout de suite voulu mettre Garry Kasparov dans la boucle, car c’est pour moi la légende vivante de ce sport et qu’il me semblait important d’avoir une figure emblématique du monde des échecs avec moi dans ce manga.
JM : Pour ce projet, avez-vous contacté en premier lieu Daitaro Nishihara (dessinateur du manga) ou Garry Kasparov ?
CB : J’ai contacté Garry en premier lieu. Je ne le connaissais pas. J’ai tout simplement envoyé un mail sur la boîte mail générale de son entreprise et quelque temps après, j’ai reçu une réponse pour un rendez-vous à Paris. Je lui ai présenté le projet et il a dit « banco, ça m’intéresse », alors qu’il n’y connaît rien en manga. Il a vu que c’était intéressant pour lui de s’adresser à un autre public via les mangas. Autre point, c’est qu’il espère pouvoir démocratiser les échecs au Japon, un pays où le shogi occulte grandement la pratique du jeu d’échecs.
JM : Comment faites-vous pour travailler entre Garry Kasparov qui est à New York, vous en France et Daitaro Nishihara qui est au Japon ?
CB : Avec Garry Kasparov, c’est assez simple parce qu’il n’intervient que sur certaines parties d’échecs pour donner quelques conseils. Il apparaît en tant que personnage. Je ne le contacte pas tous les jours. C’est quelqu’un de très professionnel et très intelligent, qui répond vite aux questions que je me pose. Il me fait entièrement confiance et il ne voit que le résultat final. Sinon, pour le reste, concernant la création du manga, nous avons des slots pour interagir dans l’équipe. Pour Daitaro Nishihara, comme je ne parle pas japonais, je passe par une interprète et évidemment c’est parfois complexe. Je m’appuie également sur mon staff basé au Japon et qui aide pour la coordination. Par ailleurs, on a notre conseiller échecs, Stéphane Bressac, qui est un joueur d’échecs français professionnel. On le consulte sur des points précis sur des parties d’échecs.
JM : Il y a le manga Hikaru no go, qui est très connu. Avez-vous été inspiré par ce manga ?
CB : Je n’ai pas fait quelque chose de similaire. Ce qui est sûr, c’est que ce sont deux mangas qui traitent de jeux de plateau, du coup c’est compliqué de ne pas les comparer. Je sais que si j’avais fait un manga sur le foot, on l’aurait forcément comparé à Captain Tsubasa. C’est la même chose pour Blitz. C’est complètement différent de Hikaru no go dans l’histoire, mais on ne peut pas échapper à la comparaison.
JM : Savez-vous combien de tomes vous allez produire ?
CB : L’histoire que j’ai actuellement en tête peut tenir sur 25 tomes, mais après ça dépend surtout si le public suit. Pour l’instant, les lecteurs sont enthousiastes. Actuellement, j’ai déjà écrit jusqu’au tome 9. Mais je peux toujours les réécrire si besoin. Mon travail est différent par rapport au manga japonais, je n’ai pas la possibilité de faire des prépublications et d’avoir des retours lecteurs chaque semaine. En revanche, comme je sors un manga tous les 4 mois, je ne prends pas trop d’avance non plus dans le scénario final pour pouvoir changer un petit peu certains éléments si nécessaire.
JM : Daitaro Nishihara arrive à suivre votre cadence. Comment fait-il pour travailler différemment ?
CB : Oui, il y a un temps différent entre l’écriture et la réalisation des planches. J’ai écrit le tome 9, mais ce n’est pas encore dessiné. Aujourd’hui, concrètement, le tome 7 est dessiné et le tome 8 en est au stade du storyboard. On n’a pas non plus énormément d’avance. Je donne mon histoire, nous discutons et dialoguons et il m’envoie un storyboard. À ce moment-là, nous faisons des ajustements et modifions tout si besoin. Il propose des storyboard qui sont très bien faits, c’est-à-dire que ce ne sont pas juste des bâtons : c’est vraiment un niveau de storyboard qui se rapproche de la qualité finale. Après, une fois que j’ai vraiment tout validé, là il passe au dessin final et on n’y revient plus.
JM : Dans le tome 4, S.A.S. le Prince Albert II de Monaco est présent. Est-il au courant de sa participation dans le manga ?
CB : Oui, bien sûr ! Sinon je serais en prison, là (rires). On ne serait pas en train de faire l’interview ! Il est au courant. Je lui ai demandé l’autorisation.
JM : Il faut une autorisation de sa part ?
CB : Je ne sais pas s’il faut, mais vu que j’ai une entreprise monégasque, que c’est notre chef d’État et que c’est un prince, j’ai préféré demander. Je suis un passionné et si je veux mettre quelqu’un dans un manga, c’est que j’apprécie la personne. C’est pour cette raison qu’il est présent. Je trouve que c’est quelqu’un de bien. Sinon cela ne m’aurait pas intéressé de mettre quelqu’un de très important. Si je n’ai pas de feeling, cela ne m’intéresse pas. Il était très heureux de cette proposition et il a dit « oui » tout de suite. Il est content du résultat aussi.
JM : S.A.S. le Prince Albert II de Monaco a lu le manga ?
CB : Oui, bien sûr. C’est la première fois qu’il apparaît dans une œuvre comme cela. On a transmis le storyboard à son équipe et S.A.S. le Prince Albert II de Monaco a validé. Il n’a rien changé à sa scène après l’avoir lu. Il a vraiment joué le jeu.
JM : Avez-vous eu l’occasion de le rencontrer ?
CB : Oui, il y a quelques mois. Le gouvernement japonais m’a remis une distinction et j’étais très heureux qu’il soit venu. Il a même communiqué une phrase à la presse pour qu’elle puisse l’utiliser. Je l’avais également vu pour lui présenter en avant-première le tome ou il apparait.
JM : Il y aura d’autres personnalités connues, à l’avenir, dans Blitz ?
CB : Je ne peux pas trop donner de détail, mais d’autres personnalités de grande envergure seront présentes. À vrai dire, il y avait déjà eu une personnalité, mais cela fait moins écho parce qu’il est moins connu. Dans le tome 3, il y a maître Yamada, qui est en fait un moine japonais de Kyoto, le plus important, et qui est connecté directement avec la famille impériale. C’est mon clin d’œil perso. Mais normalement c’est une personne intouchable. On ne peut pas faire cela si on ne connaît pas la personne et qu’on n’a pas lié d’amitié avec lui. C’est quelqu’un qu’on avait invité à notre événement Magic, qu’on organise à Monaco, mais aussi à Kyoto. Il était venu à cette occasion et on a gardé une bonne relation. C’est la raison pour laquelle il a accepté d’être dans le manga.
JM : Blitz va-t-il connaître une adaptation en anime ?
CB : J’aimerais bien, mais j’aimerais que cela ne soit pas nous qui le fassions. On a déjà des offres qui viennent de France et du Japon. Il faut juste qu’on en discute avec les différents partenaires. On n’a rien signé pour le moment, mais en tout cas, le seul fait de voir qu’il y a déjà des studios et des producteurs qui s’y intéressent me fait super plaisir.
JM : C’est l’une des premières fois que vous rencontrez vos lecteurs. Quelles sont les impressions ?
CB : Je vous avoue que je suis quelqu’un de timide dans la vie. Je ne suis pas habitué à faire des dédicaces, mais j’ai conscience qu’il y a plein de gens qui aiment voir l’auteur. J’ai des retours des gens qui me disent que leur enfant ne lit que Blitz parce que c’est un passionné d’échecs.
JM : En parlant de passion, pensez-vous que cela va susciter des envies ?
CB : Je pense qu’il y a forcément des gens qui vont se mettre aux échecs en lisant Blitz. Je ne pense pas manquer d’humilité en disant cela. On parlait de Hikaru no go. Quand il est sorti en France, le Go était complètement inconnu et d’un coup il y a eu plein de gens qui ont été dans les clubs de Go. Et je peux vous dire que j’étais le premier à tirer du milieu du terrain de foot après avoir vu Captain Tsubasa ! Je suppose que quand on réalise un manga sur un thème particulier, cela amène les gens à s’intéresser à ce thème. D’ailleurs, vous avez sans doute remarqué qu’on a été approchés à plusieurs reprises par la Fédération Française d’Échecs. Je ne me suis pas dit « je vais lancer un manga sur les échecs et je vais en parler à la fédération ». Cette idée ne m’est même pas venue à l’esprit. Pour la fédération, s’ils doivent passer par le manga pour avoir de nouveaux adeptes, cela ne les dérange pas. Ils en sont très contents.
JM : Quel est votre actualité à part le tome 6 de Blitz ?
CB : Je dois faire beaucoup de choses à l’exposition universelle de Dubaï, parce que nous sommes présents avec le manga et avec d’autres activités que nous avons dans la boîte sur le pavillon de Monaco. C’est un honneur incroyable. Parce que je n’aurais jamais rêvé être sur une expo universelle avec un manga. C’est quand même improbable ! Nous avons nos activités traditionnelles. Nous avons créé un jeu vidéo sur l’heptathlon, qui est utilisable uniquement avec un galet connecté pour faire du fitness. Nous avons créé un hardware et un software. Cela fait partie de notre actualité là puisque nous l’avons sorti l’été dernier. Nous sommes toujours sur plein de choses, mais je ne peux pas trop en parler.
Interview réalisé par Hui-Ping PANH & Charlène Zhifen LIN
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